BACHIR DERRAIS, PRODUCTEUR ET RÉALISATEUR, À L'EXPRESSION
"Entre la famille de Ben M'hidi et moi il y a une confiance totale"
"Entre la famille de Ben M'hidi et moi il y a une confiance totale"
L'Expressiondz
Samedi 04 Mars 2017
Nous célébrons aujourd'hui le soixantième anniversaire
de l'assassinat de Larbi Ben M'hidi.
http://www.lexpressiondz.com/img/art...P170304-09.jpg
Mon film est tombé par hasard lors de la célébration du cinquantenaire
de l'assassinat de Larbi Ben M'hidi.
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Mon film est tombé par hasard lors de la célébration du cinquantenaire
L'occasion de savoir où est en le réalisateur dans la fabrication de ce long métrage qui lui a coûté moult tracasseries ces dernières années, sur tous les plans. Un biopic avec Khaled Benaissa dans le rôle principal, rappelons-le et pas moins d'une centaine de rushes à voir et à revoir afin de réaliser une oeuvre «à la hauteur historique» du chahid estime le réalisateur.
L'Expression: Dans quel état d'esprit vous êtes maintenant que votre film est en plein montage?
Bachir Derrais: Quand on finit un long tournage comme ça on est soulagé. C'est un film qui nous a pris beaucoup de temps. Beaucoup de problèmes. Il fut un temps où on n'y croyait plus. Il fait partie des films très compliqués à faire. Sur tous les plans, financier, historique, humain, il demande beaucoup d'autorisations, de documents administratifs, c'est un film lourd. Donc là je suis franchement soulagé. Ma vie est en otage de ce film.
Le montage risque de prendre beaucoup de temps d'autant que vous nous avez déclaré qu'il y a plus de deux cents heures de rushes...
Il y en a plus, peut-être, 250 ou 300 heures de rushes. Le montage et la post-production sont une autre période très compliquée et très longue de fabrication du film. C'est là où on fabrique le film. Sans compter les autres domaines qui interviennent, la musique, les effets spéciaux, le mixage, l'étalonnage, les post-synchronisations. Tout ceci ce sont des opérations longues qui ne se font pas en Algérie, qui prennent beaucoup de temps. 80% de ces opérations que j'ai citées ne se font pas en Algérie. Il n'y a pas les métiers pour. Si on a les moyens techniques, on n'a pas la main-d'oeuvre, les ressources humaines, ce sont des opérations qui se font à l'étranger.
Le scénario a été revu et corrigé au fur et à mesure, beaucoup grâce à la famille de Ben M'hidi. Celle-ci a-t-elle été aussi consultée ou a-t-elle demandé d'avoir un droit de regard,, notamment sur le montage?
Entre la famille de Ben M'hidi et moi il y a une confiance totale. Je n'ai pas de problème avec eux. Il y a une confiance qui s'est installée dès le départ. Il n'y a aucune méfiance.
Ce qui est intéressant dans cette séquence de montage que nous venons de voir est le fait que vous nous introduisez au sein des réunions tumultueuses de membres du CCE, là où toutes les décisions se prenaient, non pas à la légère, loin s'en faut, mais souvent avec des prises de bec vives témoignant d'une responsabilité accrue de ces hommes à la forte personnalité...
Bien sûr, ils avaient des divergences d'idées. Vous avez vu les réunions du CCE (Comité de coordination et d'exécution). C'est lui qui a géré la révolution, jusqu'à 1957 où ils étaient obligés de partir. Ils avaient été démasqués. Ben M'hidi ne les a pas suivis. Il a été arrêté. Toutes les décisions, que ce soit la grève des 8 jours, les bombes, eh bien toutes de ces décisions étaient débattues. Les gens aujourd'hui ne savent pas comment fonctionnait la révolution. Le CCE prenait toutes les décisions en totale démocratie.
Vous dévoilez un certain côté sombre ou l'arrière-décor de cette révolution...
Yassef Saadi était sous les ordres directs de Ben M'hidi. Les gens se sont habitués aujourd'hui aux images de la bataille d'Alger. Tout ce qui se faisait dans la bataille d'Alger émanait des décisions de ce Comité-là. Il y avait ceux qui étaient d'accord et d'autres, non. Ils se chamaillaient. Ils étaient obligés de voter. Ce n'était pas n'importe qui. C'était des personnes lettrées. Des gens qui avaient des idées, très instruits, qui avaient des visions. Chacun développe son idée. Ils ne prenaient pas les décisions comme ça. Ils réfléchissaient aussi au sort du peuple. Ils ne prenaient pas des décisions suicidaires.
Nous commémorons l'anniversaire de la mort de Ben M'hidi. Vous avez choisi de ne pas sortir votre film à cette date...
Je n'aime pas les dates commémoratives, surtout officielles. Quand je fais un film, il faut qu'il soit bien fait. Qu'il corresponde à une date ou pas ce n'est pas le problème. Il faut que le film soit mûr. Ce genre de films aujourd'hui demande une maturité. Même le public algérien, aujourd'hui, il veut voir un film intelligent, objectif, mûr, pas fait dans la précipitation, pas improvisé. C'est pour cela qu'aujourd'hui nous avons une très grande responsabilité historique. Cinématographe aussi bien sûr. On n'a pas de marge de manoeuvre. Quand on prend Ben M'hidi aujourd'hui, son parcours est clair et net. On doit être à sa hauteur.
Votre film rappelons-le n'a pas été réalisé dans le cadre du cinquantenaire...
Mon film est tombé par hasard lors de la célébration du cinquantenaire. Il a avait été initié bien avant. Ce n'est pas du tout un film de commande. Il n'a pas été écrit pour le Cinquantenaire de l'indépendance. Il a été écrit bien avant. Toutefois, en raison des blocages bureautiques et administratifs que nous avons vécus à l'époque, c'est ce qui a fait que ce film traîne, prenne du retard et coïncide avec le cinquantenaire. Là, il va sortir en 2017.Le hasard fera qu'il va sortir au soixantième anniversaire de l'assassinat de Ben M'hidi. C'est un pur hasard.
Vous en êtes où donc? A quel niveau du montage?
Ca prendra quatre ou cinq mois facilement pour que le film soit terminé, car tout se fait en amont en même temps que le montage, il va y avoir la musique, les problèmes de son etc. Après le montage il va y avoir le tournage encore de quelques plans qui manquent. On n'a pas réussi à ramener les artificiers pour tourner une certaine séquence, pour de nombreuses raisons. Ce sont des scènes qu'on va faire après le montage, peut-être en effets spéciaux. Nous n'avons pas d'artificiers ici. Ce sont des choses qui sont suspendues mais je ne voulais pas pénaliser le film. Une fois qu'on aura fini le montage, on fera ces plans. C'est une question d'une journée ou deux.
Qu'en est-il de la sortie du film en Algérie et à l'étranger?
On est en train de négocier sa sortie pour septembre, y compris à l'étranger. Je pars au Festival de Cannes en vue de faire visionner mon film aux gens des festivals. On est en train de préparer une version dans ce sens.
Dernière question, êtes-vous confiant en l'avenir pour votre long métrage?
Oui je suis très confiant. Je pense que nous allons faire un film correct. Je crois même que nous avons fait un film de qualité internationale. On n'a pas du tout à rougir. Ce que je pourrais rajouter est que c'est dommage qu'on souffre sur le plan administratif. Une fois qu'on règle les problèmes des moyens financiers, nous avons à nouveau des problèmes d'ordre administratif, ainsi de suite. Nous avons réussi effectivement grâce à l'aide du ministère de la Culture et aux sponsors à trouver le fond qui manquait, sauf qu'aujourd'hui on a des problèmes pour payer les gens à l'étranger. Il faut avoir les autorisations de la Banque d'Algérie qu'on n'a pas encore. On n'est pas libre. On est coincé. C'est pourquoi on a retardé aussi le film. On continue donc à se battre.
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